Domenico Trevi, dit Mimì, est à la tête de la Sacra Corona Unità, la principale organisation mafieuse des Pouilles. Lorsque son fils se donne la mort, il lui faut trouver un bouc émissaire. La jeune Nicole, qui aurait éconduit son fils au point de lui briser le cœur, apparaît comme la coupable idéale. Dès lors, entre fureur et secrets de famille, s’enclenche une spirale de folie et de violence à laquelle il sera difficile d’échapper… Multipliant les points de vue, Andrea Donaera construit un roman polyphonique d’une rare puissance, maîtrisant de main de maître une narration tout en tension qui explore au plus près les sentiments cachés, la perte de l’innocence et la part d’ombre en chacun de nous.
"Et Mimi pense qu'il va les tuer tous. Tous, s'ils ne partent pas, s'ils ne partent pas d'ici, s'ils ne le laissent pas seul. Mimi va faire un carnage, il va les tuer tous."
Le lecteur débarque en plein recueillement familial autour du cercueil de Michele, le fils de Mimi, chef d'une organisation mafieuse de la région des Pouilles en Italie. Si la SCU est bien réelle, le sujet n'est pas d'en dépeindre l'organisation et les rites, mais d'entrer dans le fonctionnement terrifiant d'un clan. On découvre page après page, la perception de chacun des protagonistes essentiels de l'histoire face à la tempête déchaînée par la mort de Michele. Le père, Mimi, que l'on voit progressivement sombrer dans la folie, la fille, qui peut-être aurait dû partir avant qu'il ne soit trop tard, la mère, qui est restée jusqu'à en perdre la raison, Nicole, la coupable présumée, jeune innocente que la folie meurtrière ne tardera pas à rattraper, et Véli dont on ne sait pas trop combien il est coupable ou innocent mais qui tient l'équilibre entre espoir et tragédie. Le tout sur fond de la musique désormais mythique de Nirvana.
Un récit prenant, addictif et lancinant, comme la musique du groupe américain. L'auteur a un style cadencé, répétitif, fait de petites phrases percutantes, saccadées. J'ai été perturbée par ce style au début de ma lecture je dois le reconnaître. Mais l'univers oppressant et malsain dessiné par l'auteur pousse le lecteur vers la fin pour savoir comment toute cette folie va bien pouvoir s'arrêter.
"Et Arianna pense qu'elle va les tuer tous. Tous, s'ils ne partent pas, s'ils ne partent pas d'ici, s'ils ne la laissent pas seule. Arianna va faire un carnage, elle va les tuer tous."
Une belle mécanique et un style travaillé et original pour un roman où il m'a quand même manqué un peu d'âme et d'émotion. Un premier roman qui mérite qu'on s'y arrête.
Pour compléter, découvrez le billet de Titine sur Plaisirs à cultiver.
Je suis la bête, Andrea Donaera
Editions Cambourakis, septembre 2020, 216 pages
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