Deux frères, le Grand et le Petit, sont prisonniers au fond d'un puits de terre, au milieu d'une forêt. Ils tentent de s'échapper, sans succès. Les loups, la soif, les pluies torrentielles : ils survivent à tous les dangers. A leurs côtés, un sac de victuailles donné par la mère, mais ils ont interdiction d'y toucher. Jour après jour, le Petit s'affaiblit. S'il doit sauver son frère, le Grand doit risquer sa vie. Le Petit sortira-t-il ? Le Grand survivra-t-il ? Comment surtout se sont-ils retrouvés là ? Le Puits est un conte brutal à la fin cruelle et pleine d'espoir. Une fable sur l'amour fraternel, la survie et la vengeance, un roman « qui a mérité sa place au panthéon des Jules Verne, Alain-Fournier et autres Antoine de Saint-Exupéry, selon Zoé Valdés. Un roman indispensable, alors que beaucoup d'entre nous avions déjà annoncé la défaite de l'imagination contre la quotidienneté médiocre et étriquée ».
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J'avais repéré ce livre à sa sortie en 2014 mais n'avais pas encore eu l'occasion de le lire. C'est chose faite désormais grâce au prochain rendez-vous du club des lecteurs de la Bibliothèque Libre Cour qui nous invite à découvrir quelques auteurs espagnols contemporains.
J'ai donc commencé la liste proposée par Le Puits, premier roman traduit en français de Ivan Repila, éditeur et écrivain espagnol né à Bilbao en 1978.
Quel étrange récit que ce petit texte d'une centaine de pages. On se croirait plongé dans un conte où les enfants sont abandonnés par leurs parents au beau milieu d'une forêt terrifiante dans laquelle vit une vilaine sorcière. Sauf qu'ici, la sorcière ne fera pas son apparition pour tenter de manger les deux frères : elle rodera au-dessus du puits et un peu en marge de l'histoire.
On découvre ce qui est nécessaire à la survie des deux garçons : comment ils vont boire et manger, pouvoir dormir quel que soit le temps, au fond de ce puits de 7 mètres de profondeur. Mais l'auteur nous parle avant tout d'humanité : car se nourrir ne suffit pas à survivre. Le Petit par exemple a besoin de parler, de rêver, se raconter des histoires, de jouer aussi. Il a besoin d'interagir avec son grand frère qui lui est devenu beaucoup plus pragmatique et a pris de la distance avec sa part d'enfance. L'impact de cet isolement sur la part d'humanité du Petit est plus fort que pour le Grand car il bouscule ses rêves et son langage. Les besoins fondamentaux de l'Homme sont bien de se nourrir, mais ne suffisent pas à faire de lui un Homme.
Le récit est court mais très riche, il évoque de nombreux thèmes tels que la relation fraternelle, la misère et la survie, le sacrifice et la violence. Mais comme dans un mauvais rêve, le lecteur ne dispose pas de toutes les clés de compréhension : pourquoi sont-ils là, qui est la personne qui rôde en haut du puits ? L'auteur laisse de nombreuses zones d'ombre, de quoi stimuler notre propre imagination.
Curieuse de savoir de quoi l'auteur voulait nous parler, quel était le sens de la métaphore que l'on perçoit dans ce texte, j'ai écouté une interview de l'auteur réalisée lors de la 30ème Comédie du Livre de Montpellier. J'y ai découvert l'importance des textes épigraphiques en général (le terme même d'ailleurs) et de ce récit en particulier. Ils lui donnent en effet une dimension sociale que je n'avais pas perçue et qui me donne désormais à réfléchir. Un texte à relire peut-être en gardant bien cette dimension à l'esprit pour en comprendre toutes les significations. Même si, comme le dit l'auteur, quand un livre est publié, il appartient au lecteur qui en produit sa propre interprétation. Moi j'y ai lu la misère, sociale et intellectuelle, la violence faite aux enfants, le regard détourné des adultes...
"Dans un système de libre échange et de libre marché, les pays pauvres - et les gens pauvres - ne sont pas pauvres parce que les autres sont riches. Si les autres étaient moins riches, les pauvres seraient, selon toute probabilité, encore plus pauvres." Margaret Thatcher.
"Je vins dans les villes au temps du désordre
Quand la faim y régnait.
Je vins parmi les hommes au temps de la révolte
Et je me suis révolté avec eux.
Ainsi passa le temps
Qui m'était donné sur la terre."
Bertold Brecht
Un texte à lire et à relire pour en saisir toutes les richesses.
Il y avait longtemps que je ne m'étais pas trouvée face à un texte si séduisant et une telle écriture, à la fois lyrique et réaliste. (Zoé Valdès - Préface)
Le puits - Ivan Repila
Editions Denoël - octobre 2014 - 112 pages
D'autres avis chez Jérôme, Clara, Cassandre ou Cryssilda.
1ère lecture du Comité de Lecteurs |
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