Auteur : Collectif Argos
Titre : Gueule d'Hexagone
Poche : 288 pages
Editeur : Intervalles
Sortie le 15 octobre 2012
Une lecture d'une très grande richesse.
Présentation de l'éditeur :
A
quoi ressemble la France d’aujourd’hui ? Qui sont ses habitants ?
Comment se connecte-t-elle au village mondial ? Quel chemin a-t-elle
parcouru depuis cinquante ans ? Telles étaient quelques-unes des
questions que se posaient les douze auteurs de Gueule d’Hexagone
avant de commencer leur travail. Pour ce projet étendu à six
territoires français, six binômes, associant chacun un écrivain et un
photographe, furent constitués et une méthode de travail spécialement
conçue. Objectifs : renouer avec l’enquête de terrain au long cours,
raconter dans chaque lieu une histoire éclairante, associer les
habitants aux différentes étapes des reportages.
Souvent
décalés, très variés dans leur style comme dans leur approche, les six
récits révèlent des facettes peu connues de l’Hexagone, découvrent des
lignes de forces inédites, déplacent quelques repères réputés
inamovibles. Dans leur dialogue, ces histoires ébauchent un portrait
dynamique et inattendu de la vie française en ce début de millénaire.
Ma lecture :
J'ai reçu cet ouvrage samedi matin par courrier, dans le cadre de l'opération Masse Critique proposée par Babelio.
Je me suis bien vite jetée dessus, et tout aussi vite été un peu
déçue... La couverture et la mise en page ne sont pas très glamour (oui,
en effet, ce n'est pas vraiment ce que l'on demande à un tel ouvrage),
mais, pire, les photos que j'ai feuilletées ne m'ont pas intéressée du
tout. Ca commence mal me direz-vous...
Et
pourtant, j'ai rapidement voulu voir de quoi il en retournait. Et j'ai
commencé par le dernier reportage. Pourquoi le dernier ? Parce que j'ai
été déçu par ce premier aperçu du livre et que, quitte à ne lire qu'un
seul reportage, autant que ce soit celui d'une région m'intéressant : la
Bretagne, et en l'occurence Plozevet, dans le Finistère.
Et à partir de là, tout s'est enchaîné très vite et le livre était terminé dimanche soir !
Tout m'a énormément plu dans cet ouvrage : les récits et les portraits
que nous font chacun des binômes de ce projet, l'angle des reportages,
la vitalité des récits, la qualité du texte, l'intérêt évident que
portent ces binômes aux régions présentées et aux acteurs de ces récits,
et puis, et non le moindre, la qualité des photos
retenues et le message qu'elles transmettent. Il ne faut surtout pas
s'arrêter à la première impression qu'elles peuvent produire. Et ne pas
fonder un jugement sur les photos seules. Dans chaque reportage,
celles-ci sont présentées à la fin des 12 pages de texte. Et quand on en
arrive là, il nous semble feuilleter un album de famille. Les lieux
comme les visages nous semblent familiers. J'ai tourné les pages avec
attention, chacun des clichés ayant un sens pour moi.
Créé en 2001, le collectif Argos
rassemble dix journalistes. Autant d’auteurs investis dans une démarche
documentaire fondée sur la nécessité de témoigner des mutations du
monde contemporain. Que ces changements soient écologiques, économiques,
politiques ou culturels, discrets ou spectaculaires, locaux ou globaux,
néfastes ou porteurs d’espoir, l’être humain est toujours au cœur de
leurs récits. En 2004, lorsque le collectif décide de travailler sur les
conséquences du dérèglement climatique, il se tourne ainsi vers les
populations les plus immédiatement menacées. Fruit de cette longue
enquête, le livre Réfugiés climatiques a été
réédité en 2010. Être au plus près des hommes et des femmes dont ils
parlent, prendre le temps nécessaire pour construire une relation de
confiance sont, pour les photographes et les écrivains d’Argos, les
conditions sine qua non d’un travail conçu comme un outil de démocratie.
Depuis son origine, le collectif Argos est également un laboratoire
transmédia qui cherche à repenser la réalisation, l’écriture et la
diffusion de ses projets dans un univers médiatique en pleine
révolution.
Les apprentis - Jacques Windenberger |
La
lecture de cet ouvrage m'a ramenée quelques années en arrière, à mes
années d'études à la faculté de Sociologie de Nantes. Durant l'année de
Maîtrise, nous avions un cours de "Photographie". Il s'agissait alors
non seulement d'étudier la pratique de la photographie dans un
environnement social donné, mais également d'étudier la photo comme matériaux d'enquête sociologique.
Et c'est bien ce à quoi s'attachent les membres du collectif Argos. Ils
cherchent à décrire par le texte, à travers des résultats d'enquêtes,
d'observations et d'entretiens, et par la photographie, des conditions
de vie de groupes sociaux spécifiques. Des groupes qui sont à la fois
singulier mais également représentatifs de ce qu'est la France. Ce livre
est finalement le résultat d'une étude ethnographique des français.
Tous ces reportages ont fait sens pour moi : Plozevet
et l'engagement du cuisinier du collège dans son environnement local et
pour l'éducation des enfants à une alimentation saine et respectueuse
de l'environnement ; Fos-sur-Mer et la cohésion et
solidarité d'une équipe de football amateur sur fond de complexe
industriel et pétro-chimique comptant pas moins de 13 sites classés
Seveso ; Saint-Paul-sur-Ubaye et le quotidien d'un
petit village de montagne où les nouveaux arrivants tentent d'insuffler
un peu de vie et de solidarité dans les relations humaines ; Sarcelles,
ville mondialisée où une centaine de communautés tentent de maintenir
des liens de solidarité malgré les effets de la pauvreté ; Charmes,
dans les Vosges, où la désindustrialisation massive fait des ravages et
où l'Histoire n'est jamais bien loin qui laisse des traces douloureuses
desquelles il est difficile de s'exonérer pour construire l'avenir ; Marseille,
pour finir, où un quartier populaire au coeur de la grande ville peine à
garder son authenticité et à conserver, là encore, ces solidarités de
"village" que les nouveaux habitants viennent pourtant rechercher.
Marseille - Jacques Windenberger |
Tous
ces témoignages sont d'une grande force et nous font nous poser tant de
questions sur ce qui a vraiment de l'intérêt, sur ce qui a vraiment du
sens dans une vie. A la lecture de ces reportages, on peut se demander
si ceux qui nous gouvernent connaissent vraiment la France. A moins que
ce ne soient les médias qui ne vont pas suffisamment à la rencontre de
ces français à qui ils prétendent parler chaque jour... Ce livre est une
belle illustration du travail du journaliste !
Je vous invite vivement à découvrir ce livre d'une très grande richesse et à consulter le site du collectif Argos.
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Une lecture réalisée dans le cadre de l'opération Masse Critique proposée par Babelio (grand merci à eux et à la maison d'édition Intervalles.
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