Peut-on passer un Mois anglais sans lire un Jane Austen ? Impensable. Alors je me suis lancée dans la lecture de ce titre emprunté chez mes parents et qui commençait à prendre la poussière. C'est le second titre de Jane Austen que je lis, le premier était Lady Susan, qui m'a fait découvrir Jane Austen en 2012 à l'époque de mon premier blog. J'avais été séduite par cette auteure, mais il m'a fallu 6 ans avant de relire Jane Austen. Dommage parce que j'aime vraiment ce type de récit, la langue d'une autre époque, les sujets choisis qui donnent à voir des préoccupations à la fin du XVIIIème siècle, son analyse de la société et sa critique de la condition féminine qui transparaît dans ses textes et font de ses textes une œuvre toujours actuelle.
Persuasion - Jane Austen.
Éditions Archipoche, avril 2017, 236 pages.
Présentation de l'éditeur :
Anne est la seconde fille de l’honorable Sir Elliot de Kellynch. Persuadée par son amie Lady Russel, elle a dû rompre ses fiançailles avec le jeune Frederick Wentworth, un officier de marine pauvre, car il ne présentait pas les assurances d’un bon parti. Huit ans plus tard, sa famille connaît des revers de fortune. Son père décide alors de louer le château familial à l’amiral Croft, qui se trouve être le beau-frère de Frederick. Anne appréhende de revoir celui qui est resté son grand amour. Alors que s’achève la guerre avec la France, le capitaine Wentworth, fortune faite, revient avec le désir de se marier pour fonder un foyer. Il a conservé du refus d’Anne la conviction que la jeune fille manquait de caractère et se laissait trop aisément persuader…
Dernier roman complet de Jane Austen, achevé en août 1816, un an avant sa mort, Persuasion offre la satire d’une société engoncée dans ses principes, ainsi qu’une galerie de personnages croqués sans aménité : un père futile qui ne pense qu’à son apparence, une sœur cadette égoïste et hypocondriaque, un cousin arriviste, une veuve manipulatrice… Comme dans Northanger Abbey, la vie mondaine et superficielle de Bath sert d’arrière-plan.
Publié à titre posthume en 1818, Persuasion est aussi le seul roman de Jane Austen écrit pendant la période où l’action se situe : il est entrepris le 8 août 1815, le jour même où la population britannique apprend l’exil de Napoléon à l’île d’Elbe. En toile de fond, on trouve donc la défaite, l’abdication et l’exil de l’Empereur.
Ma lecture :
Merci au Mois Anglais de m'avoir fait redécouvrir Jane Austen ! Cela faisait bien longtemps que je m'étais promis de relire cette auteure et le challenge de Lou & Cryssilda m'en donne l'occasion.
J'ai d'abord eu grand plaisir à retrouver la langue de Jane Austen. J'ai l'impression, à lire ses textes, de me retrouver projetée au XVIIIème siècle dans le salon d'une famille de la noblesse anglaise, à passer des heures oisives un livre entre les mains. J'adore cette langue châtiée, pleine de bon goût, de sous-entendus. Rien n'est dit directement, les sentiments sont exprimés par périphrases. Les promis s'observent, se frôlent mais jamais leurs regards ne se croisent, jamais ils ne se touchent. La bienséance est toujours de mise. Les futurs époux se rencontrent toujours sous le regard du reste de la famille. La langue de Jane Austen me donnerait presque envie de déguster ses livres assise bien droite dans un fauteuil, l'ouvrage sur les genoux et une tasse de tea à la main. J'aime beaucoup cet univers et cette distinction qui émane de chaque phrase.
"Presque huit ans s’étaient écoulées depuis que tout était rompu. Combien il était absurde de ressentir encore une agitation que le temps aurait dû effacer ! Que de changements huit ans pouvaient apporter ! tout résumés en un mot : l’oubli du passé ! C’était presque le tiers de sa propre vie. Hélas, il fallait bien le reconnaître, pour des sentiments emprisonnés, ce temps n’est rien."
J'ai également trouvé le sujet de ce livre intéressant, charmant. Je me suis plongée avec plaisir dans le sillage de Anne Elliot, de ses espoirs et déceptions. Jeune fille sage de 27 ans, elle assiste sans amertume aux stratégies maritales de son père et de sa belle-famille pour caser les filles restant à marier. On sent au début du récit que Anne a probablement laissé passer l'occasion en se laissant influencer par son père et surtout Lady Russel, l'amie de la famille, qui l'ont dissuadée d'épouser Frederick Wentworth, insuffisamment placé dans la hiérarchie sociale. Les jeunes filles et les jeunes gens défilent tandis que les parents tentent de les assortir au mieux des intérêts de la famille. Anne y trouvera-t-elle finalement son compte ? La maturité de Anne en fait un personnage très attachant sachant éviter les affres de l'impulsivité et de la passion.
La ville de Bath où vient s'installer la famille Elliot |
Le récit sera le point de vue Anne qui essaye de faire bonne figure, d'œuvrer pour le bien de chacun, au détriment parfois de ses propres intérêts. Elle partage avec le lecteur ses impressions et ses états d'âmes, ses espoirs et ses souffrances. Un peu à la manière d'un journal intime, Anne nous donne à ressentir ses propres sentiments et émotions. Ce qui m'a le plus marquée, c'est cette capacité à faire comprendre des sentiments sans jamais pouvoir les exprimer, ni même regarder celui à qui ils sont destinés. Tant de retenue et de manières dans l'expression de la passion est stupéfiant pour le lecteur d'aujourd'hui. L'auteur fait également preuve d'un grand talent pour dépeindre le caractère intéressé et envieux de Sir Elliot de Kellynch et de sa fille aînée. L'air de rien, avec des mots soigneusement choisis et beaucoup de respect, Anne, sous la plume de Jane Austen, dépeint des personnages sournois, égocentriques et terriblement cupides et calculateurs. C'est parfaitement jubilatoire !
Cette plongée dans un autre siècle, d'autres mœurs et une autre langue est dépaysante et rafraîchissante. Cette lecture m'a fait un bien fou : j'espère ne pas mettre 6 nouvelles années avant de relire Jane Austen. Avec Orgueil et préjugés peut-être, ou Northanger Abbey... ce ne sont pas les idées qui manquent !
Si vous avez besoin d'autres raisons pour lire ce livre, je vous invite à aller lire les billets chez Une tasse de thé, Sur la route de Jostein, Miss Alfie (moins enthousiaste) ou encore chez Eveyeshe.
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