Auteur : Frédérika Amalia Finkelstein
Titre : L'oubli
Broché : 176 pages
Éditeur : Gallimard
Collection : L'Arpenteur
Édition : 28 août 2014
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Présentation de l'éditeur :
Je m'appelle Alma et je n'ai pas connu la guerre. J'ai grandi en écoutant Daft Punk, en buvant du Coca-Cola et en jouant à des jeux vidéo sur la Playstation 2. Un jour, j'ai appris que mon grand-père avait fui la Pologne quelques années avant la Seconde Guerre mondiale, avant la Shoah. Ce mot m'a longtemps agacée : son côté spectaculaire. Mais vendredi soir, quand je me suis retrouvée face à la petite-fille d'Adolf Eichmann et qu'elle n'arrivait pas à se remémorer le nom du camp d'Auschwitz, j'ai ressenti comme une douleur, elle a duré quelques secondes. Je me suis rappelé l'exergue de "Si c'est un homme" de Primo Levi : "N'oubliez pas que cela fut, non, ne l'oubliez pas" ; je crois que je veux faire exactement le contraire. Oublier tout.
Ma lecture :
"Je suis à la recherche d'une solution à mon existence qui n'a jamais été possible pour la simple raison que je suis immergée dans un monde sans solution au problème posé. Il se peut cependant que je me trompe, et que la solution existe mais qu'elle soit sans visage. Comme un n dans une opération arithmétique. Je me dis qu'un tel n pourrait être la solution au problème de mon existence, soit potentiellement n'importe quel chiffre correspondant à un entier naturel. Le chiffre caché derrière le n existe mais jamais il ne pourra être dévoilé parce que sa possibilité est infinie. Dans une telle configuration la solution serait donc cette absence. C'est une pensée que je pourrais admettre car elle me convient. Je pourrais envisager le monde à partir de cette lettre. Je pourrais dire : j'ai trouvé la solution au problème majeur de la vie, à ce mot ingrat qui ne satisfait aucun raisonnement : à la naissance, à la mort, à ce lieu maintenant, à moi, à vous. La solution peut être nommée, elle s'appelle n mais son visage est une ombre. Là-dessus, je ferai silence, nous n'avons pas besoin d'en savoir plus car nous ne le pouvons pas." [L'oubli - Frederika Amalia Finkelstein, Gallimard, page 103]
Voilà. Tout est dit. Cet extrait est pour moi la quintessence de ce texte. Après lui, nul besoin d'en dire plus. Ne reste plus qu'à refermer le livre, en essayant de ne pas trop y penser, de ne pas chercher plus avant ce que l'auteure à bien pu vouloir dire précisément... Ce passage est la démonstration de la façon dont est construit l'ensemble du récit : une succession de réflexions sans doute très philosophiques, eu égard à la formation de l'auteure, mais énoncées de manière si confuse, avec de tels développements et digressions, que la lectrice que je suis n'en a jamais perçu le sens.
"Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
Selon que notre idée est plus ou moins obscure,
L'expression la suit, ou moins nette, ou plus pure.
Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
Et les mots pour le dire arrivent aisément."
Selon les termes célèbres de Nicolas Boileau-Despréaux, ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement. Et j'avoue m'interroger encore sur le sens que souhaitait donner Frederika Finkelstein à son livre. Tout au long de ma lecture, j'ai douté qu'elle le sache elle-même. L'idée de départ me semblait pourtant très séduisante : comment une jeune femme de ce début de XXIème siècle peut-elle vivre en dédaignant le poids que l'Histoire fait peser sur ses épaules. Le poids de la douleur, du crime, de l'horreur, la culpabilité ou celui de la mémoire.
Beaucoup de choses transparaissent dans ce récit : la souffrance, l'obsession, aux frontières de la folie. La solitude aussi, de cette jeune femme qui s'épuise à tenter d'oublier. Dont l'esprit semble se perdre à force de chercher les réponses à ses questions. Une femme de son temps, entre les jeux vidéos, Daft Punk, les sodas et la télé, qui s'est laissée noyer par l'Histoire. Car finalement, il ne me semble pas que le sujet principal de ce livre soit la Shoah, mais plutôt la folie, qui aurait pu prendre pour terreau n'importe quel autre sujet. L'obsession d'Alma pour les chiffres et sa perception du monde à travers eux en est le signe. Sa violence aussi.
Le lecteur erre avec Alma dans les rues de Paris à la recherche de réponses. Alma marche, en pleine nuit, jusqu'aux limites de l'épuisement, physique et mental, jusqu'à la rupture. Alma carbure au Coca... on perçoit pourtant dans son cheminement quelques délires alcooliques. A moins que ce ne soit la folie...
"Après l'illusion de la course, il y aura l'illusion du retour. Mes souvenirs reviendront à la surface, à nouveau je voudrai les oublier. Je chercherai ailleurs. Et j'irai d'étourdissement en étourdissement, de secret en secret, de solitude en solitude, de signe en signe, de sourire en sourire, de jeu en jeu, d'abandon en abandon, de travail en travail, d'amertume en amertume, d'attachement en attachement, de trace en trace, [...] de brou de noix en brou de noix, de visage en visage, [...] de robe en robe, de tee-shirt en tee-shirt, de chemise en chemise, de chaussure en chaussure, [...] de magazine illustré en magazine illustré, [...] de Pepsi en Pepsi, [...]" [L'oubli - Frederika Amalia Finkelstein, Gallimard, page 118]
A écrire ces lignes, je me dis que ce texte m'a quand même touchée... Mais ce ne sont que des perceptions, des images, des souvenirs, des ressentis... Car je n'ai presque rien compris à l'écriture de l'auteure. Je n'ai jamais saisi où elle souhaitait me conduire. J'ai construit une histoire avec ce que je suis, ce que j'ai lu, ce que j'ai vécu... Mais il est peu probable qu'un autre lecteur partage mon interprétation de cette excursion obscure.
L'enthousiasme de certains me laisse confuse, et n'aura d'égal que l'exaspération de ceux qui auront le sentiment d'avoir été abusés. Je pense qu'on ne les réconciliera pas. A lire par curiosité... quoi que.
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Ma quatrième lecture de cette rentrée littéraire, et la première LC du Comité de lecteurs. Il s'agit également d'une plume au féminin et d'un premier roman.
Punaise, tu me rassures, j'ai lu deux fois l'extrait sans rien comprendre, mais rien de rien...je suis étonnée qu'un éditeur ait publié cela en l'état. Pourtant punaise, le pich a de l'allure !!!
RépondreSupprimerCe titre fait partie de ceux que j'avais listés pour cette rentrée littéraire : les articles le concernant étaient très tentants. Je n'ai pas accroché, mais beaucoup ont été séduits. Comme toujours, à chacun de se faire une opinion... ;-)
SupprimerJe suis sûre qu'en recopiant les extraits, tu as oublié des mots. Non ?!
RépondreSupprimerSi seulement...
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