Depuis que j'ai ouvert ce blog, et grâce notamment au rendez-vous proposé par Mango, j'ai voulu découvrir cette forme d'expression artistique qu'est la BD et que je ne connais pas (à part bien sûr mes classiques Astérix, Boule et Bill, Gaston et autres Tintin). Mais après un peu fureté, très peu je le reconnais, j'ai toujours eu l'impression de rester en gare. Il me manquait souvent quelque chose et à bien y réfléchir, je pense qu'il me manquait quelques pages. J'ai ainsi dérivé progressivement vers les Mangas (plus denses mais trop "Young Adults" à mon goût) et, enfin, vers les romans graphiques. Je pense avoir trouvé là un bon compromis entre le dessin et le roman qui prend le temps de développer récit et personnages. "Deux frères" est un roman graphique, de 240 pages, paru chez Urban Comics et tiré du roman de Milton Hamoun.
Présentation de l'éditeur :
Yaqub, fils d'une famille libanaise établie dans la ville brésilienne de
Manaus, revient au pays après cinq ans passés au Liban. Il retrouve son
père, sa mère et surtout son frère jumeau, Omar. Tous attendent
d'assister au bonheur de la réunion des deux frères mais personne n'a
véritablement pris conscience que ces cinq ans de séparation ont en
réalité cristallisé leur rivalité née à l'occasion d'une querelle
sentimentale, quelques mois avant le départ subit de Yaqub pour le
Liban. Une rivalité que la cicatrice au visage de Yaqub ne cessa de lui
rappeler chaque jour de son exil à l'étranger.
Ma lecture :
Pour ce rendez-vous du mois d'avril, le Club des lecteurs de la Libraire Lise & moi était invité à découvrir ce roman graphique tiré du roman du même nom, de Milton Hamoun, un auteur que je ne connais pas. 240 pages : ça me convient. Moi qui ai toujours l'impression de rester sur ma faim avec les classiques BD, même quand le graphisme me plaît beaucoup, je sais que là, mon appétit sera satisfait.
Frères jumeaux, Fábio Moon et Gabriel Bá sont nés en 1976 à São Paulo,
au Brésil, où ils vivent toujours actuellement. Ils racontent des
histoires sous forme de bandes dessinées depuis presque quinze ans.
Ne connaissant pas le roman de Milton Hamoun, je ne pourrais vous dire si cet album y est fidèle. Cependant, l'adaptation graphique de Moon et Bá comportant autant de pages que le roman de Hamoun, je peux supposer que les auteurs ont pris le temps d'aller au fond de l'histoire et de rendre fidèlement la densité du récit original. Et c'est effectivement ce que j'ai ressenti à la lecture de cet album. Le texte est riche, la construction aussi complexe que peut l'être un roman, avec des retours en arrière pas toujours facile à suivre, des changements de points de vue et de perspectives... Certaines choses sont également sous-jacentes, à peine exprimées. La lecture de ce récit n'est pas toujours aisée. J'ai pas exemple parfois eu du mal à bien identifier les personnages, Yaqub et Omar étant des jumeaux que peu de choses distinguent, au moins dans leur enfance. Mais loin d'être une faiblesse de l'album, cette difficulté, alliée au nombre de pages, invite le lecteur à se plonger pleinement dans le récit. Il ne peut simplement rester en surface comme cela m'arrive parfois avec les BD, les terminant sans même m'en rendre compte.
L'histoire en elle-même est également très intéressante. On y voit cette relation entre les deux frères jumeaux que beaucoup de choses éloignent au début du récit, en premier lieu leur mère, Zana qui jamais ne parviendra à aimer ses fils de façon juste et équitable. Cette injustice qui enverra Yaqub au Liban durant 5 années. C'est le retour de Yaqub qui nous est raconté ici, avec des retours dans le passé des parents, Zana et Halim qui explique bien des choses et des rancœurs accumulées au sein de la famille. Finalement, Yaqub, l'exilé, délaissé par sa mère, porte en lui une soif de revanche qui lui donne l'énergie pour construire sa vie et se battre. Parti loin de Manaus, Yaqub finit par devenir le symbole de la réussite familiale et on attend de lui qu'il pardonne à son frère les souffrances passées. Mais la réussite n'efface pas tout et les blessures passées ne demandent qu'à se rouvrir au risque de détruire cette famille toute entière. Et comme la vie n'est jamais tout noir ou tout blanc, on se prend en fin de récit, à relativiser la place de chacun des membres du clan. Un beau récit qui donne envie de lire l'original, car malgré tout, il me semble que rien ne remplacera la forme littéraire.
Côté dessin enfin, si je suis toujours un peu déçue par le noir et blanc, il faut reconnaître ici la force du trait. Très anguleux, le dessin témoigne de l'énergie et du caractère affirmé des protagonistes. Il me semble que le dessin resitue aussi parfaitement l'ambiance d'une Amérique latine d'après-guerre. Malgré tout, j'ai toujours du mal à percevoir ce qu'apporte le dessin sur un récit classique... Je cherche dans les dessins des détails, la beauté des paysages, des costumes, les couleurs... que je n'ai pas trouvé ici et que, finalement, je ne trouve que très rarement dans les BD ou romans graphiques. C'est toute la force de notre imagination à la lecture d'un roman classique et ce qui fait aussi que l'on est très souvent déçus par un film tiré d'un livre que l'on a lu et aimé.
Cela n'en reste pas moins une belle histoire, forte et dense, que je vous conseille de découvrir. Et de mon côté, j'irai bien voir du côté de l'Aliéniste, des deux mêmes auteurs, mais en version BD (62 pages).
Deux frères de Fábio Moon & Gabriel Bá, d'après le roman de Milton Hamoun.
Urban Comics Éditions, coll. Urban Graphics, 20 mars 2015. 240 pages.
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Il s'agit donc de ma première lecture pour le rendez-vous d'avril du Club des lecteurs de la Librairie Lise & moi, et de ma première participation au rdv des BD de la semaine qui prend la suite de la BD du mercredi initiée par Mango et se donne rendez-vous cette semaine chez Stéphie.
J'ai le roman d'Hatoum et la bande-dessinée dans ma pal, il me tarde de les lire tous les deux... et surtout la BD, je l'avoue, tellement j'ai aimé Daytripper !
RépondreSupprimerEn revanche ton article me conforte dans la décision de commencer par le roman. Bises !
C'est intéressant ta réflexion par rapport à l'intérêt de porter en BD un texte littéraire. Les auteurs s'en étaient expliqués dans une interview et j'avais trouvé leur éclairage passionnant.
RépondreSupprimerEt à part ça j'ai adoré ce roman graphique, même au niveau du dessin (mais il faut dire que pour moi rien ne surpasse le noir et blanc ;) )
Je note ce titre pour les vacances d'été.
RépondreSupprimerQuel bel album oui. Je me retrouve tout à fait dans ta chronique. Pour tenter de différencier Yaqub et Omar, j'essayais de chercher la cicatrice de Yaqub. Mais je suis loin d'avoir trouvé cette lecture aisée, même si j'ai apprécié ma découverte.
RépondreSupprimerJ'ai trouvé le noir et blanc intéressant, une petite difficulté de se retrouver entre les personnages au départ de l'histoire, et puis, le rythme pris, le livre se suit facilement.
RépondreSupprimerC'est très graphique, en effet. Ca me plait.
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